La veille, il avait neigé sur Manhattan et cela m'évoquait irrésistiblement une chanson de Marie Laforêt. Hier encore, Central Park était recouvert d'un blanc tapis et la proximité de l'océan m'avait attiré ici, que la neige avait épargné. La F-Line m'avait rapidement emmené loin des gratte-ciel de Manhattan et Marie Laforêt avait laissé la place à Lou Reed.
J'étais ailleurs ici. À quelques heures du changement d'année, rien ne semblait réellement concerné. Une voiture de police patrouillait dans une avenue gigantesque et désertée.
Les antiques manèges forains étaient arrêtés, certains définitivement. L'été qui les voit trépider au son des flonflons et des cris enfiévrés des new-yorkais, était bien loin aujourd'hui et l'hiver avait figé ces mastodontes de métal. La Wonder Wheel, immobile, sortait directement d'un film, Angel Heart, peut-être... Le temps avait-il prise sur le parc d'attractions ?
Une population indigente, faite d'homeless et de riverains, se rassemblait sur le boardwalk, si fréquenté en été quand les rideaux métalliques des échoppes sont remontés, et aujourd'hui si désert.
Et ce pour quoi j'étais venu, était enfin devant mes yeux. L'Océan Atlantique se jetait lentement sur une plage de sable interminable et abandonnée. Oublié Manhattan, oubliée la neige ! Il ne faisait pas bien chaud, évidemment, mais il faisait si beau. C'était un 30 décembre et entouré seulement de mouettes moqueuses, j'étais bien cette année-là...
[Coney island, New York, le 30 décembre 2005]