La 20e Nuit des Molières
Sur la scène de Mogador, se jouait hier soir, la vingtième nuit des Molières. L'intrigue en est simple, éculée et ne serait même pas digne du théâtre de boulevard si l'assemblée n'était aussi relevée et les décors aussi riches.
Chaque année, c'est pareil. De beaux costumes, des tirades déclamées sur un ton étrange, dont la monotonie n'a dégale que le manque de naturel, par des acteurs... pardon, des comédiens en smoking et des comédiennes en de magnifiques toilettes, compensant parfois visuellement ce que l'oreille était incapable de réellement apprécier.
Mais aussi quelques faux-pas amusants, quelques longueurs inévitables, l'antienne habituelle sur la situation des intermittents et la présence du ministre de la Culture. On se croirait aux Césars, tiens. Pourtant, il y a une grosse différence avec les Césars, en tout cas pour moi... Aux Molières, je ne connais presque personne ! Alors, me demanderez-vous perplexe, voire goguenard, pourquoi regarder cette émission, si semblable d'une édition l'autre, où vous voyez, indifférent, des inconnus gagner un prix pour un spectacle dont vous ignoriez jusqu'au nom quelques secondes auparavant ? Honnêtement ? Je ne sais pas.
Et puis si, je sais. Parce que Danièle Lebrun a eu le molière du meilleur second rôle féminin. Ah, Danièle Lebrun... Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été amoureux d'elle ! Quelle belle femme ! Que ce soit la Cecily de Chéri-Bibi ou la Roxane de Saint-Gély de Vidocq, je ne saurais résister à son regard langoureux, ses lèvres pulpeuses, son sourire mutin et sa voix enjôleuse ! On peut, à l'envi, mélanger dans la phrase substantifs et adjectifs, avec elle, tout reste vrai (sauf peut-être regard pulpeux).
Je passerai sous silence les autres résultats parce qu'encore une fois, je ne connaissais aucune des pièces nommées. Il faut dire que pour moi, le théâtre s'arrête au Misanthrope, aux Caprices de Marianne et à Caligula. Le reste existe certes, mais pas pour moi. Je noterai quand même le palmarès étonnant de la rubrique révélations : James Thierrée, petit fils de Charlie Chaplin et Marilou Berry dont on ne sait pas si elle obtient cette récompense par atavisme (c'est la fille de Josiane Balasko) ou par népotisme (c'est la nièce de Richard Berry) ou même par talent, bien que cette dernière hypothèse paraisse peu crédible.
Les Molières, c'est aussi l'occasion d'en revoir les meilleurs moments, succulents, uniques. L'occasion, moins drôle, de méditer sur les accidents de la vie avec les disparitions de l'année écoulée... Darry Cowl, Suzanne Flon... et Thierry Fortineau. Le choc. J'étais passé à côté de son décès, en février. J'avais suivi sa carrière quand plus jeune comédien, il était avec une fille que je connaissais. Puis, il y avait eu le succès, Marutschka Detmers, l'alcool...
Pour illustrer cet article, j'ai choisi une photo du théâtre, que j'avais prise un après-midi où je musais dans le neuvième arrondissement. Personnellement, j'aime bien cette photo à cause de la façon dont est écrit Mogador... On ne se refait pas.
[Vingtième nuit des Molières, lundi 24 avril 2006, France 2]