Ma phase Théâtre se poursuit avec bonheur. Après Michel Bouquet le mois dernier, voici un autre monstre sacré. Il restera toujours pour moi, le Comte d'Artois tout de rouge vêtu, vantard, arrogant et têtu, tenant tête aux Rois de France, aux banquiers lombards et à sa mégère de tante Mahaut... j'ai nommé, Jean Piat.
La Maison du Lac se joue au Théâtre de Paris, rue Blanche. Une place de rêve, second rang au milieu, avec une distribution de rêve, Jean Piat et Maria Pacôme, dans un théâtre de rêve, boîte à bonbons rouge et cosy, pour une soirée de rêve. Le décor est magistral, avec cette maison tout en bois à l'atmosphère si naturelle, et ces arbres si réels... D'abord, un mot de la pièce:
Kate et Tom passent un été paisible au bord d'un lac. Les mois passeront, apportant leur lot de visites - celle de Claudia, leur fille - mais aussi de surprises. De vieilles rancoeurs vont se révèler au grand jour.
Mais laissons Jean Piat en parler lui-même.
"Être mère, c'est l'enfer !" écrit Alphonse Daudet dans l'Arlésienne... Être père se révèle parfois tout aussi malaisé ! Être fille n'est pas non plus si confortable...
Surtout si des parents, amants d'exception, sont devenus avec le temps, des complices égoïstes et tendres. Ce pourrait être un sujet de tragédie, puisqu'au fond "tout le monde a un peu raison". Par bonheur, La Maison du Lac est une comédie. Elle obéit à la règle essentielle du genre qui est de plaire, de divertir et "de faire rire les honnêtes gens".
Tout y est dit...
Mais l'amour, le charme et l'humour - vertus essentielles à la ville comme à la scène - permettent toutes les rudesses, toutes les franchises en évitant de trop grands déchirements.
Merci Jean.
Une comédie douce-amère où l'on (sou)rit de bon coeur devant le spectacle divertissant de ce couple fusionnel, hors du commun, mais aussi une comédie émouvante où les relations entre parent et enfant sont mises à bien rude épreuve. Le temps passe, parfois futile, parfois tempétueux. Mais de cette lutte larvée, terrible, c'est le spectateur qui sort victorieux.
La Maison du Lac est au départ un roman d'Ernest Thompson et cette libre adaptation est de Jean Piat, Dominique Piat et Pol Quentin, dans une mise en scène de Stéphane Illel. Jean Piat et Maria Pacôme, qui a dû remplacer Danielle Darrieux, indisponible, au pied levé, succèdent ainsi au couple mythique - côté cour comme côté jardin - Simone Valère et Jean Dessailly, la réalisation ayant été confiée à l'époque, à Georges Wilson. Eux-même succédaient à des acteurs de légende, Edwige Feuillère et Jean Marais, Marie-Christine Barrault jouant leur fille. Peut-on rêver plus belle distribution ? À se demander si les plus riches heures du théâtre ne se trouvent pas derrière nous...
Mais La Maison du Lac, ce fut encore auparavant, le film avec Henri Fonda et Katharine Hepburn, dans lequel la fille d'Henri Fonda était jouée par sa propre fille, Jane. Une pluie de statuettes avait récompensé le film de Mark Rydell qui raflait ainsi l'Oscar du meilleur scénario, celui du meilleur acteur et de la meilleure actrice. Je suis un peu embarrassé pour en parler, vu que je ne l'ai pas vu (justement), mais il semblerait que la comédie y soit plus dramatique, sans doute plus proche du livre éponyme.
Et enfin, the last but not the least, France 2 diffuse ce samedi, le 14 donc, la pièce en direct du Théâtre. Est-il utile de vous dire que regarder n'est pas un droit, mais un devoir ? Il est difficile de conseiller un spectacle que l'on a aimé, par peur de décevoir mais je prends le risque. À part quelques petites longueurs, vite effacées par le talent de Jean Piat, je ne vois pas ce que l'on peut reprocher à cette pièce... si ?
[La Maison du Lac, théâtre de Paris, sur France 2, samedi 14 mars 2009, 20h35]