Hôtel de ville, 21h34 (II)
Je me souviens de l'Hôtel de ville à 21h34, un soir glacial... brrr...
Mais là, c'est l'été. Paris vit à l'heure allemande. Mais la seule raison en est cette Coupe du Monde porteuse de gloire ou de désespoir. En ce mardi 27 juin, le match incertain entre la France et l'Espagne a débuté. Les supporters se sont amassés devant les postes de télévision qui ont fleuri pendant la nuit chez les restaurateurs et les cafetiers prévoyants. À 21h34, les clameurs de déception du but espagnol viennent à peine de s'interrompre.
Et sur la Place de l'Hôtel de Ville, cet écran, immense, vierge de la moindre image - dérisoire ? - nargue les spectateurs. Car pour une fois, la mairie de Paris n'a pas fait le choix du sport, mais de la culture. En effet, dans le cadre de Paris Cinema, sera projeté dans quelques minutes, sur cet écran gigantesque, Les Triplettes de Belleville. Le film n'est pas commencé, les gens s'allongent, négligemment, sur les nattes mises gracieusement à leur disposition ou s'assoient, détendus, dans les transats que l'on leur propose. Moi, je ne m'assoie, ni ne m'allonge. Les Triplettes, je les connais. Et je l'aime bien, ce dessin animé. Mais je n'ai pas envie de le revoir, c'est trop nostalgique pour moi, trop nostalgique pour ce soir-là.
Je me rappelle, avoir vu, il y a quelques années, dans les mêmes conditions, mais Place des Vosges, l'admirable Manèges - Yves Allégret, 1950 - avec un Bernard Blier touchant et une diabolique Simone Signoret. Je l'avais revu une nouvelle fois, toujours avec le même frisson. Et le fait de communier avec cette foule anonyme, silencieuse et émue, rajoute une dimension que le cinéma classique ne permet que rarement.
Mais Paris Cinema, ce sont aussi deux promenades cinématographiques, proposées en mp3 - téléchargeables gratuitement ici - avec la voix de Virginie Le Doyen pour Saint Germain des Prés, et celle de Lou Doillon pour la visite nocturne de Pigalle, reservé à un public plus averti.
[Place de l'Hôtel de Ville, Paris, 27 juin 2006]