Nuit blanche, oxymore parisien 2007
Ambiance électrique samedi soir pour cette sixième édition de la Nuit Blanche : une journée quasi-estivale que personne n'attendait, suivie d'une victoire des bleus que pers... euh, non, rien. La Place de l'Hôtel de Ville était prise d'assaut, mais le reste de la capitale n'était pas en reste.
Cette année, le thème de la nuit est la ligne 14, qui relie Olympiades à Saint-Lazare. Commençant par la Grande Bibliothèque, je consulte mon programme :
Groupe Zur - Palarbres
Le groupe Zur «Zone Utopiquement Reconstituée» investit l’esplanade de la bibliothèque François Mitterrand, en proposant une création in situ qui fait se rencontrer et se révéler l’image cinéma, la matière et l’acte. Peu à peu le lieu et ses visiteurs plongent dans un univers onirique et poétique.
Mouais. Une fille lit, allongée sur un lit recouvert d'un immense voile pendant qu'un homme manipule tout un tas de trucs aussi bizarres qu'inutiles, produisant une musique lénifiante. Si j'allais voir de l'autre côté de la passerelle ?
Un car était planté dans le sol, dans le parc, ses phares éclairant le ciel obscur. Que dit la notice ?
Générik Vapeur - Carnac number one
Sur la place Bernstein du parc de Bercy, un bus de ville marseillais est planté à la verticale en étendard visuel et sonore au cœur de la cité comme une «totémisation de la mémoire». À la lueur de cette lampe de chevet géante, le public sera invité à flâner autour de ce mégalithe où bruissent les mots de la ville, il se fait aussi lieu de vie où l’on ose sur la cymbalisation des cigales.
Ah ça, pour flâner, il flânait. Une petite partie avait investi les quelques transats (marseillais ?) présents. Certains dansaient même autour, jouant la totémisation à fond...
Par curiosité, je suis allé voir les Champs mais si le bordel y régnait en maître, on était encore loin de la Place de l'Hôtel de Ville, cependant il était encore tôt, minuit à peine. Direction la rue Cardinet, dans ces terrains vagues réservés naguère à des JO que nous n'avons pas eu. L'endroit était à la hauteur de mes espérances, une immense halle, bordée par des terrains au sol incertain. Des RER passaient au loin, transportant d'hypothétiques voyageurs.
Compagnie Off - Paraboles, pièce pour soprano et dispositif vidéo interactif
Six paraboles géantes deviennent le support d’une rencontre certaine entre le son et l’image, la musique des étoiles en pleine recomposition et la voix lyrique d’une soprano clonée à l’infini. L’écoute de l’immensément lointain nous aide-t-elle à percevoir l’infiniment proche ?
Par la captation de messages destructurés provenant du cosmos, décodés, interprétés par la voix humaine d’une soprano, une partition concrète se compose. À l’aide d’un logiciel interactif audio et vidéo, la présence visuelle et sonore de la chanteuse, septième planète du système ainsi mis en place, est augmentée par 6 clones d’elle-même. Ces doubles sont projetés sur d’immenses antennes paraboliques installées dans l’espace public – supports d’image et de diffusion sonore de part et d’autre de l’interprète.
Coup de bol, le spectacle commence peu après mon arrivée. Enfin, coup de bol, suis pas sûr...
L'image de la soprano suspendue entre terre et ciel était reproduite sur les six paraboles, chacune répondant aux autres.
- C'est Marie
- Non, Marie ne sait pas
- Ce n'est pas Marie
Cela dit, techniquement, c'était une belle performance. Artistiquement, c'est plus discutable...
Retour sur la ligne 14, à Madeleine, pour une oeuvre que je tenais à voir :
Paul Cox - Par-dessus le marché
Le marché d’Aguesseau se transforme en un onirique village de lampions luminescents, invitant au calme et à la promenade.
Le hold-up de la soirée.
Mais une certaine agitation rodait autour de l'église. Ni une, ni deux, je me mets derrière la file, l'attente ne sera pas bien longue...
Les Souffleurs commandos poétiques - La Confidence des oiseaux de passage
La Confidence des oiseaux de passage est l’installation d’une forêt sensible peuplée d’oiseaux polyglottes. Ces oiseaux mystérieux en savent long sur les hommes, qu’ils survolent depuis la nuit des temps.
Avant de s’envoler vers d’autres contrées, ils se posent à Paris pour chuchoter du sommet des arbres leurs «tresses de langues» (en français, anglais, allemand, japonais, arabe, italien, espagnol, portugais) et dire aux promeneurs nocturnes de la forêt les immenses secrets dont ils sont porteurs et qui nous concernent, nous, hommes et femmes de notre temps ensevelis dans la voracité de nos agendas.
Comment dire ?
Tous les bancs avaient été retirés de l'église de la Madeleine, ce qui lui conférait un aspect profane intéressant. J'avais cependant du mal à garder mon sérieux. Les gens agitaient lentement les mains pour attirer vers eux les tresses de langues et les mettre à leur oreille, pendant que les oiseaux de passage prenaient des airs inspirés... du grand art, sans nul doute.
Un peu éprouvé, j'allai jeter un oeil à Saint-Eustache, près du Forum des Halles :
Pleix - Astral Body Church
Astral Body Church est un triptyque contemporain qui a pour thème la tentation de la vie éternelle. Sur la façade de l’église Saint-Eustache, sont projetées des images de bodybuilders aux visages de vieillard qui enchaînent lentement des poses de fitness. Une démonstration subversive mais avec beaucoup d’humour du déplacement du culte de l’esprit vers celui du corps.
Beaucoup d'humour... certes. Mais il était plus que temps de se coucher, presque quatre heures. Deux conclusions s'imposent. Primo, cette édition fait montre de plus d'initiative et d'expérimentation que la précédente mais je l'ai trouvée moins convaincante et moins plus accessible. Reste une expérience unique malgré tout qui permet de voir Paris sous un jour inédit. Deuzio, j'ai vraiment du mal à faire des photos de nuit potables. Bon, c'est vrai que sans pied, ce n'est pas facile...
-> L'album Nuit Blanche
-> Nuit blanche, oxymore parisien 2006
[Nuit Blanche 2007, du 6 au 7 octobre 2007]